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La Presse au fil du temps

Un choix éclectique ou un certain éclectisme

Les Éditions Complexe, une maison belge, a eu l’heureuse idée de présenter au grand public dans un format de poche accessible par son prix et élégant dans sa forme, des ouvrages fort remarqués par la critique lors de leur première publication et trop souvent inabordables et pas toujours disponibles en librairie.
Déjà le programme réalisé est impressionnant. Plus de 15 titres en un an. On peut se faire une idée du choix éclectique. Ce dont on n’ira pas se plaindre. (...)
La collection s’étoffe de plusieurs titres qui touchent à divers aspects de l’histoire des mentalités. Des ouvrages de grande envergure.

Marc-Fernand Archambault, Le Devoir (Montréal), 8 février 1985.

Si Versaille m’était conté

André Versaille, qui a créé la première collection d’inédit au format de poche, fête les quinze ans de sa maison d’édition. Au catalogue des éditions Complexe, une pléiade d’historiens de talent, mais aussi Popper, Adorno, et Habermas

Au bout de quinze ans d’activité, André Versaille peut être satisfait de ses « Complexe ». La maison a publié plus de 300 titres, créer la première collection d’inédits au format de poche. Elle ne se contente pas d’établir son propre bilan, mais celui du siècle tout entier sous forme d’un colloque « Penser le XXe siècle » qui doit se dérouler au mois d’avril avec la participation d’historiens comme Marc Ferro, Hélène Carrère d’Encausse, Pierre Milza, Alfred Grosser, etc.
(…)
Le premier ouvrage publié, Le Temps des étrangers, sur les immigrés en Belgique, donne déjà le ton de la maison : « Donner au lecteur une information socio-historique ouverte sur notre actualité », ce qui n’est pas très facile lorsqu’on prend le contre-pied de selon laquelle la solution du chômage passe par le renvoi des travailleurs immigrés.
Complexe doit développer parallèlement une activité de diffuseur qui prend en charge Maspero, le Puf, Payot, etc. L’expérience est rentable et bénéfique, « ça a été une bonne école », reconnait André Versaille.
Il publie des textes de sciences humaines et constitue petit à petit un catalogue estimé où on trouve Reik, Popper, Adorno, Habermas. Enfin, il y a cinq ans, Complexe lance une collection de poche, « La Mémoire du Siècle ».
« Le projet a vu le jour à le suite de discussions avec Philippe Ariès. J’avais envie de livres qui analyse les mentalités sur un temps court, à partir d’un moment historique donné à la faveur d’un événement qui cristallise les passions et opère comme un révélateur. Un peu comme une carotte géologique qui renseigne sur les différentes couches géologiques traversées. »

En cinq ans, la collection trouve sa vitesse de croisière, avec quarante-cinq titres publiés, même si elle pâtit des préjugés attachés au livre de poche. Chaque ouvrage est entièrement inédit. Jean Lacouture a même accepté de suspendre la rédaction de son gros De Gaulle pour écrire dans cette collection un ouvrage sur les accords d’Évian. (…)
À côté de « La Mémoire du Siècle », André Versaille crée une collection de livres de réédition d’ouvrages historiques en poche, reprend à Fayard la revue Le Genre humain en lui enjoignant même une collection autonome. (…)

Le quinzième anniversaire de Complexe n’est pas seulement pour André Versaille l’occasion de faire un premier bilan de son travail d’éditeur, c’est aussi le moment de lancer de nouveaux projets encore plus ambitieux. Puisque la formule de « La Mémoire du Siècle » a fait ses preuves, il envisage de l’étendre en fondant une nouvelle collection : « La Mémoire des Siècles » qui couvrirait toute la période « De la mort de Socrate à la Commune de Paris. »

Gérard Meudal, Libération, 20 mars, 1986.

Continuer à faire vivre les livres au-delà des trois mois traditionnels

Pour célébrer leurs quinze années d’existence, les éditions Complexe organisent les 18 et 19 avril, à l’institut de sociologie de l’Université de Bruxelles, un colloque sur le thème : « Penser le XXe siècle ». Interviendront notamment Marc Ferro, Hélène Carrère d’Encausse, Alfred Grosser, François Bédarida, François Joyaux, Gérard Chaliand, Fred Kupferman et Pierre Milza.

Lorsqu’ils fondèrent Complexe en 1971, Danielle Vincken et André Versaille n’avaient pas de projet éditorial très précis : ils voulaient s’occuper de livres, rester proches des questions contemporaines et prouver que l’on pouvait faire l’aussi bonne édition à Bruxelles qu’à Paris.
Ils ont pris leur temps. Les cinq premières années, ils se consacrèrent principalement à la diffusion en Belgique d’éditeurs français, à l’apprentissage des métiers du livre et à la connaissance précise du terrain. Une expérience irremplaçable. Les cinq années suivantes ils commencèrent à éditer de façon suivie et cohérente un certain nombre d’ouvrages de sciences humaines. Entre autres, le surprenant petit livre de Freud sur la cocaïne, et Fromm, Reik, Adorno.
Et puis, il y a cinq ans - on va de cinq en cinq ans chez Complexe - André Versaille a lancé la collection qui devait asseoir la renommée de la maison, « La Mémoire du siècle », une série de petits livres - quarante-cinq ont déjà paru sur les cent vingt titres prévus - qui réconcilient l’histoire événementielle, politique, avec la longue durée, histoire des mentalités, la vie profonde des sociétés dont chaque événement est une crise. La réussite est telle que, dès l’an prochain, Complexe va lancer, sur le même principe, « La Mémoire des siècles » qui évoquera les événements-clés de l’histoire de l’humanité et la manière dont ils ont été vécus et pensés par leurs contemporains.

Dans le même temps, Complexe poursuit la publication de la revue Le Genre humain, qu’elle a repris, il y a trente mois, aux éditions Fayard, et que dirige Maurice Olender. Une revue qui s’intéresse à l’ensemble des sciences humaines contemporaines et donc pour l’éditeur, un vivier pour y pêcher des thèmes porteurs et y découvrir des auteurs.

À quinze ans, Complexe est décidé de passer à la vitesse supérieure et aborder le domaine littéraire. Avec la même volonté :
« Continuer à faire vivre les livres au-delà des trois mois traditionnels, et combattre la dissolution du passé au nom de l’avenir »

P. L., Le Monde des Livres, 4 avril 1986.

Pourrions-nous vivre sans Complexe ?

Les éditions Complexe fêtent leur quinzième anniversaire en organisant un colloque sur l’histoire contemporaine : elles sont fidèles à leur image de marque.
Pour un large public, Complexe, c’est avant tout la « Mémoire du siècle », une collection de petits ouvrages passionnants comme des romans policiers où un auteur compétent mais pas pète-sec traite d’une question cruciale qui a agité les esprits depuis 1900 (le génocide arménien, le procès de Vichy, la libération de Paris, les Jeux olympiques de Berlin, l’assassinat de Jaurès ou la déstalinisation. (…)
Le colloque promet d’être de première force. Il ne devrait pas faire écran de fumée et empêcher les amateurs de sciences humaines d’évaluer à son juste prix l’apport des éditions Complexe dans le domaine de la lutte anti-raciste : devons-nous rappeler ici l’existence de la revue Le Genre humain (si intelligemment animée par Maurice Olender) qui, au fil des années a réussi à devenir un instrument d’analyse et de dénonciation des discrimination de tout bord ? De même ne faudrait-il pas méconnaître les ouvertures psychanalytiques et philosophiques d’un éditeur qui s’est payé le luxe de mettre l’accent, bien avant d’autres sur des penseurs aussi conformes à nos souhaits actuels que Karl Popper ou Leszek Kolakowski.
Pourrions-nous vivre sans Complexe ?

Michel Grodent, Le Soir, 17 avril 1986.

Un catalogue particulièrement prestigieux…

En quinze ans à peine, deux éditeurs bruxellois sont parvenus à bâtir un catalogue particulièrement prestigieux. Et à devenir un des grands noms de l’édition belge à l’étranger…

Marianne Hendrickx, Media Marketing, juin 1986

Un pari sur la qualité scientifique

Un pari sur la qualité scientifique, le format de poche où se bousculent inédits et grandes traductions, les approches contemporaines de l’histoire, la séduction vers Paris. Le soutien logistique d’un éditeur-diffuseur prestigieux : les Presses universitaires de France.
Un travail d’éditeur où l’on s’engouffre passionnément et sans savoir, que l’on étudie au fil des années passées à exercer un métier jumeau - la diffusion-distribution - pour y trouver ensuite son propre créneau. Un pari tenu avec de grands auteurs, un vrai catalogue, 80 % d’exportations principalement outre-Quiévrain. L’entreprise d’un duo où André Versaille pencherai plutôt du côté "œuvres" et Danielle Vincken côté "business". Deux versants d’un même métier.

Christiane Rugemer, Intermédiaire, 22 février 1988.

Directeur des Éditions Complexe, André Versaille se fait de son métier une conception généreuse

Être éditeur pour lui, c’est avoir envie d’offrir des livres qu’on aime. Et quand on aime, c’est archiconnu, on a toujours vingt ans ! Nous voici tout naturellement ramené au thème de la Foire du Livre par un amoureux de la lecture qui n’a de cesse de faire partager ses passions.

« Très jeune, je me servais déjà des livres pour communiquer mes émois. Quand un passage me plaisait, je le photocopiais et l’envoyais aussitôt à des amis. Franchement, pour l’éditer, il faut qu’un livre me séduise. Bien sûr, tous ne provoquent pas chez moi le coup de foudre, et je dois souvent me prêter aux nécessités d’une collection. Mais d’une manière générale, je me vois mal dans la peau d’un éditeur de manuel d’électricité » (…)
La profession d’éditeur, André Versaille n’est pas loin de la comparer à un artisanat amoureux.
« Dans mon métier, il y bien sûr 90 % de travail de routine (Factures, gestion de stock, invendus, etc.) mais ce travail est largement (ré)compensé par les 10 % de plaisir quand le livre sort : même si j’ai lu deux ou trois fois le texte en manuscrit et sur épreuves, même si la couverture n’a plus de secret pour moi, lorsque le livre arrive dans mon bureau, c’est toujours un peu une surprise et c’est comme si j’avais besoin de le prendre physiquement en main pour m’assurer de son existence. Ensuite, je guette les premières réaction dans la presse, dans le public. Bien sûr, les chiffres de ventes, c’est important, mais je reste d’abord attentif à la qualité du livre et à vérifier que la presse et le public saisissent son intérêt. »
Le directeur de Complexe parle de son point de vue particulier, voire résolument « particulariste ».
« À notre niveau, nous le pouvons pas nous ne pouvons pas rivaliser avec les grandes maisons d’édition - encore moins avec les grandes machines éditoriales. Nous sommes condamnés à cultiver notre jardin et penser d’abord en fonction de notre spécificité éditoriale. De toutes façons, même si j’avais envie de pratiquer une politique de « coups » je n’en aurais ni les moyens ni la capacité. »
(…)
Le fonds Complexe est surtout formé d’ouvrages historiques. D’où vient chez l’éditeur cet amour de l’histoire ?
« Ce goût, je le dois à la lecture de Dumas. J’aurai toujours la nostalgie des lectures de mes treize ans, au cœur de cet univers enchanteur. Et si j’ai lu plus tard Michelet, et plus tard encore Tocqueville, c’est bien grâce à Dumas. Bien sûr, j’ai pas mal évolué depuis, mais un premier amour littéraire - comme un premier amour tout court, d’ailleurs - ne s’oublie pas. Cependant, aujourd’hui, l’histoire m’intéresse comme lieu de débats, à explorer pour comprendre notre actualité. »

Michel Grodent, Le Soir, 2 mars 1991.

Le bel anniversaire ! On n’a pas tous les jours vingt ans

Entrée en édition en 1971, avec Le Temps des étrangers, par réaction à la politique douteuse de l’immigration en Belgique, André Versaille et Danielle Vincken y sont restés, ajoutant à leur rage de participer, d’analyser, de témoigner, la passion de communiquer et de partager.

Cela donne une série de collections historiques et littéraires foisonnantes : "La Mémoire du siècle", "Questions au XXe siècle", "Le Temps et les Hommes", mais aussi les grands de la littérature (Dumas, Eugène Sue...) avec notamment "Le Regard littéraire" de géants sur d’autres pointures (Zola évoque Manet, Verhaeren, Ensor) et depuis l’an dernier, "L’Heure furtive" qui propose de courte fictions inédites d’auteurs étrangers méconnus chez nous. Le tout en format de poche, histoire de tenir le plus petit espace possible chez les libraires encombrés mais une position stratégique.
Le succès est là pour attester de la vivacité intellectuelle et commerciale de Complexe. Dès septembre, les éditeurs lancent une nouvelle collection de dictionnaires grand format cette fois, avec La Civilisation grecque, Les Ordres religieux, Fascisme et nazisme.

Sophie Creuz, L’Écho, 6 mai 1991.

Les vingt ans de Complexe : l’histoire autrement

« Je dois tout à Alexandre Dumas. Il a été l’instigateur de ma passion pour l’histoire », clame André Versaille, éditeur et créateur de la maison bruxelloise Complexe. Rendant hommage à son maître, il intitule son catalogue Complexe, vingt ans après. Et c’est vrai, dans Le Comte de Monte-Cristo, déjà histoire et politique se répondent dans le plus pur style romanesque. Tout ce que cet homme vif et cultivé adore est contenu dans l’œuvre de Dumas. Alors, pour rendre à César ce qu’il lui appartient, André Versaille, qui a lié son destin à Danielle Vincken, à décidé de faire de l’histoire autrement. Pour ressusciter Hippolyte Taine par exemple.
Aujourd’hui serein, ce couple inséparable fête ses vingt ans de vie commune.
Sage et tempérée, Danielle Vincken se souvient de tous les détails de leurs aventure littéraire. Depuis leur rencontre à l’université dans l’effervescence de la rédaction d’une petite revue étudiante baptisée Complexe, jusqu’à l’épisode contestataire lorsqu’ils publièrent Le Temps des étrangers contre les autorités judiciaires belges.
Affable et bouillonnant, André Versaille est un Belge tendance méditerranéenne. Il raconte avec beaucoup de talent les quelques bonnes idées qu’ils ont eues ensemble, mais il avoue aussi que leurs rencontres avec des hommes remarquables ont fait beaucoup pour la longévité de Complexe. En se liant d’amitié avec Philippe Ariès, dès 1971, ils ont inauguré un nouveau genre , la collection « La Mémoire du siècle », dans laquelle, au-delà de l’événementiel, chaque auteur montre combien certains faits historiques sont fondateurs et en même temps révélateurs de l’état d’une société et de sa mentalité. (…)
Le cercle des amis historiens s’agrandi : Gérard Chaliand, Pierre Milza, Serge Berstein, Zeev Sternhell.
Complexe se devait d’envahir la littérature. Utilisant la même tactique, André Versaille a lancé la collection « Le Regard littéraire » qui constitue une véritable originalité. André Versaille explique en caressant sa barbe : « Nous voulions montrer, contre Lagarde et Michard, que la littérature peut être polémique ; qu’elle peut être violente et fanatique. » Cette collection ranime enfin le plaisir de « discuter » littérature. Dans la tradition du siècle dernier, Jules Barbey d’Aurevilly s’enflamme contre Diderot, tandis qu’Alexandre Dumas, encore lui, raconte dans ses Nouveaux Mémoires (inédites), ses relations avec Gérard de Nerval. On s’amuse beaucoup à comprendre comment un écrivain, en accablant un autre, brosse le plus souvent son propre portrait.
Et quand André Versaille nous raconte « son » Flaubert intitulé La Bêtise, l’art et la vie, on rit franchement de sa tendre férocité. Et on remarque aussi le point communqui lie les deux hommes : un bel appétit pour la vie.

Sophie Obaldia, Le Figaro littéraire, 6 mai 1991.

Vingt ans de Complexe

« Complexe », adjectif et substantif pourtant lourd à porter, va ainsi faire sa deuxième entrée dans le dictionnaire.

Avec à ce jour, à leur catalogue plus de 400 titres répartis sur huit collections, les éditions Complexe font figure désormais de doyen des petits éditeurs indépendants des années 70-80. (…)
Deux atouts décisifs ont assuré la durabilité de l’entreprise : le choix de l’inédit au format de « poche » qui, vu son faible coût, ne surcharge pas le stock des libraires et peut ainsi demeurer « à vie » sur leurs rayonnages, et, dans le même temps, la mise en place d’un réseau autonome de diffusion-distribution : Nouvelle Diffusion (Sur l’hexagone où sont réalisé 80 % de son chiffre d’affaires, Complexe est aujourd’hui diffusé par les PUF). D’où un contrôle permanent de toute la chaine de vie du livre. C’est à partir de cette réflexion atypique mais déterminante qu’à pu se développer une véritable politique éditoriale, se constituer un catalogue d’auteurs, de textes inédits ou rares.

La production est axée sur deux grands domaines privilégiés : l’histoire, pilier de la maison, avec cinq collections parmi lesquelles « La Mémoire du siècle », « Questions au XXe siècle » ou « Le Temps et les hommes ».

D’autre part, la littérature avec « Les Romans terribles » (Dumas, Eugène Sue, Ponson du Terrail), « Le Regard littéraire », récits de voyages ou écrits critiques et esthétiques de grands auteurs sur d’autres artistes : voyages de Taine, Régnier ou Mérimée, lettres de Proust et de Gide, pamphlets de Barbey d’Aurevilly contre Diderot, de Gombrowicz contre les poètes, écrits sur la peinture de Barrès (Le Greco), de Zola (Manet) ou de Verhaeren (Ensor), sans oublier Gracq, Blanchot, Céline ou Zinoviev. Et depuis 1990, « L’heure furtive » propose de courtes fictions inédites d’auteurs étrangers peu ou pas traduits, comme Bai Xianyong, Hadzis, Kavan ou Iwaskievicz.
Dernière parution : Les Dragons ne connaissent pas le paradis de Caïo Fernando Abreu, Brésilien né en 1948, dont l’œuvre est encore inédite en français.

La rentrée de septembre pointe déjà à l’horizon, et avec elle une innovation de taille, à tous les sen du mot : le lancement d’une collection de dictionnaires, reliés et grands format. Premières parutions prévues : La Civilisation grecque, Les Ordres religieux et Fascisme et Nazisme.

« Complexe », adjectif et substantif pourtant lourd à porter, va ainsi faire sa deuxième entrée dans le dictionnaire.

Bruno Gendre, Libération, 23 mai 1991.

Pour saluer Complexe

Vingt ans après, André Versaille a conquis son brevet de mousquetaire de l’éditions belge.

Ghislain Cotton, Le Vif / L’Express, 1er juillet 1991.

L’Éditeur de la semaine : Un éditeur d’histoire qui a maintenant son histoire

Quand Danielle Vincken et et André Versaille ont lancé leur maison d’édition, ils n’imaginaient pas la suite… Mais 400 titres publiés en vingt ans, c’est aussi une histoire vécue passionnellement par toute une équipe.

Pierre Maury, Le Soir, 22 mai 1991.

Chez Complexe, l’Histoire ne se cultive pas par nostalgie du passé

Histoire et enseignement, n° 2, 2e trimestre 1991

Editors Complex

In defiance of commercial common sense, two young partners in publishing have achieved international success with a list of books on grimly serious subjects.

Cleveland Moffett, The Bulletin, October 17, 1991.

Les vingt-cinq ans de Complexe

Les Éditions Complexe (…) sont connues pour leur fameuse Bibliothèque Complexe qui regroupe des textes de littérature et d’histoire inédits ou introuvables en format de poche.

Pour fêter leur vingt-cinquième anniversaire, elles décident de donner une nouvelle impulsion à leur démarche éditoriale et de publier des livres plus volumineux, abordant de manière exhaustive et originale des œuvres littéraires et historiques, les deux domaines de prédilection de la maison.
C’est ainsi que présenté par André Versaille, le directeur des éditions Complexe, un La Fontaine, Œuvres, sources et postérité, somme de 1 700 pages qui réunit dans un même volume toute l’œuvre du fabuliste, des études et des textes d’hommage d’écrivains célèbres (Valéry, Taine, Sainte-Beuve) ainsi que des textes et pastiches en tous genre sur La Fontaine.
« Donner à lire une œuvre en la restituant dans le contexte de son élaboration », c’est également la démarche qui anime la publication de deux autres anthologies, Histoires de doubles et Le Fantastique féminin d’Anne Radcliff à Patricia Highsmith, deux ouvrages présenter par Anne Richter.
Dans le domaine historique, une série de dictionnaires est annoncée avec en mars la parution du monumental Dictionnaire de la France contemporaine de Gisèle et Serge Berstein 1 600 pages en deux volumes pour tout savoir sur l’histoire politique, économique, sociale, culturelle et religieuse de la France du XXe siècle.

Le Figaro littéraire, 22 février 1996.

André Versaille, l’encre dans le sang

Loin de l’hystérie parisienne, mais tout près également, les éditions Complexe fêtent leurs 30 ans d’existence. L’on sent-là l’encre parfumée qui coule dans les veines de l’éditeur.

Eric de Bellefroid, La Libre Belgique, 20 février 2001.

André Versaille, éditeur alchimiste.

Trente ans, l’âge des questions et celui des possibles.

Rangée B4, Stand 12. Si vous arpentez les travées de la Foire du Livre, sachez que c’est là que se nichent les éditions Complexe fondées voici 30 ans par André Versaille, un papivore dont la passion ne s’est jamais essoufflée avec le temps.

Isabelle Monnart, La Dernière heure, 15 mars 2001.

Une maison qui se veut sans complexes, mêlant humour et réflexions sur le monde

C’est avec un éventail de marque-pages et de citations que Complexe fête ses trente ans. « On peut vivre sans livres. Oui mais tellement moins bien ! » (Giovanni Dipazza), « Le métier des lettres est tout de même où l’on puisse sans ridicule ne pas gagner d’argent » (Jules Renard), « Un beau livre, c’est celui qui sème à foison les points d’interrogation », « Un livre doit être la hache qui brise en nous la mer gelée » (Kafka). Ce petit florilège définit la démarche d’une maison qui se veut sans complexes, mêlant humour et réflexions sur le monde. La souris de Plantu vient compléter les signets de citations et d’annoncer : « Complexe a trente ans, ça s’arrose ! » Le dessin orne même une cuvée spéciale de côtes-du-rhône.

Complexe est fier de son âge et de son catalogue : près de 900 titres publiés depuis 1971, dont 500 restent au catalogue ; une quarantaine de livres par an pour un chiffre d’affaires de 10 millions de francs (1,5 millions d’euros). De nombreuses ont été lancées au début des années 1970, pour disparaître ensuite. Son nom indique d’emblée que la maison ne cherche pas la facilité. Complexe a un autre défaut : c’est un éditeur belge. Ça n’empêche pas d’avoir de l’ambition en France et les pieds sur terre. D’emblée, les deux fondateurs de la maison, André Versaille et Danielle Vincken, créent une structure de diffusion qui représente des éditeurs comme Payot ou les Puf. « Ça mettait du beurre dans le épinards, mais ça nous a surtout appris le principe de réalité. Le véritable travail de l’éditeur commence quand le livre est sorti », explique André Versaille.
Les débuts sont difficile, mais la maison commence à s’imposer dans les années 1980 avec la collection d’Histoire - avec de nombreux inédits en poche - née de la lecture d’un sondage qui indiquait que 64 % des Français ne savait pas qui avait déclaré la guerre en 1939. Alors, André Versaille a imaginé ces livres conçus comme des « machines à remonter le temps », tous centrés sur une période courte de l’histoire, avec des ouvrages d’Hélène Carrère d’Encausse, Marc Ferro, François Fejtö, André Kaspi, Mohammed Harbi, etc.

Passionné de littérature, André Versaille avait créé une très belle collection d’histoire littéraire, « Le Regard littéraire » qui propose des jugements d’écrivains sur leur pairs :
« C’est une collection de textes injustes, explique-t-il. Quand un écrivain déteste un autre écrivain, il vous donne en même temps envie de le lire ». Mais les deux grandes fierté du directeur de Complexe, ce sont les sommes qu’il a conçues sur La Fontaine Œuvres, sources et postérité d’Ésope à l’Oulipo et le Dictionnaire de la pensée de Voltaire par lui-même.

Amateur de citations, il trouve le secours dans Voltaire pour se battre contre la « worldysneysation de l’édition » :
« Les sottises qu’on fait, qu’on dit et qu’on écrit, étant plus multipliées que la race de Jacob, et que les sables de la mer, il est difficile de faire un choix. Toutes ces innombrables vessies, accumulées les unes sur les autres dans le gouffre de l’oubli, crèvent au moment qu’elles sont formée, et il en résulte un immense nuage dans lequel on ne discerne plus rien. »
Dans ce brouillard, il a par exemple publié, avec Le Monde diplomatique, L’Âge des extrêmes, d’Eric Hobsbawm, refusé par plusieurs éditeurs, et qui a dépassé les 60 000 exemplaires.

A. S., Le Monde des Livres, 20 avril 2001.

2008 : Naissance d’André Versaille éditeur

André Versaille éditeur, toute une histoire !

Quand André Versaille, fondateur de la maison d’édition éponyme, raconte sa conception de l’Histoire et du métier d’éditeur historique, on sent vibrer sa passion pour l’Histoire, la dialectique et la culture.
D’ailleurs, plus que des livres, André Versaille éditeur propose une vision du monde. Rencontre avec un éditeur pas tout à fait comme les autres.

(Agathe Bozon, Lecteurs, 8 novembre 2011)